Le secteur des campings, nouveau lieu de bataille des fonds d’investissements
Peu cher et extrêmement rentables, les fonds d’investissements luttent pour racheter des centaines de campings partout en France avec pour objectif de les rénover et faire monter les prix.
L’étoile d’Argens, écolodge de 471 emplacements répartis sur 11 hectares, établi à Roquebrune sur Argens dans les alentours de Fréjus et les Lacs du Verdon, un ensemble développé par Homair étendu sur 17 hectares et regroupant 500 emplacements ont une particularité commune.
Ils font tous deux partie de ces campings, dont le nombre ne cesse de croitre, appartenant à des fonds d’investissements. Autrefois aménagés sur des bouts de sable le long des plages, le secteur des campings est devenu le lieu de bataille des fonds d’investissements qui luttent chacun de leur côté pour créer le plus gros « groupe d’accueil de plein air ».
Cette nouvelle appellation vient de remplacer celle de « camping » devenue désuet dans les quartiers d’affaires internationaux afin de correspondre au standing de ces investisseurs d’un genre nouveau.
Dernier exemple correspondant à cette mouvance, le groupe mondialement connu Suisse Life, spécialisé dans la gestion de patrimoine et assurances, vient de créer une sicav dédiée au financement de campings intitulée Club Pain Air Tourisme. Dans les mois à venir, Suisse Life investira dans ce marché qui présente de réels atouts pour ses investisseurs.
Une rentabilité pouvant atteindre 20%
Les principaux atouts de ces investissements sont de dégager une marge brute supérieure à 90% et une rentabilité pouvant atteindre 20% avec un chiffre d’affaires en croissance de 4 à 5% par an.
Au-delà de ces avantages indéniables, l’ensemble du marché de parcs sous enseignes ne représentent que 15% et nombreux sont ceux possédés par une population de propriétaires vieillissants.
Suite à la mise en place de nouvelles règles environnementales, notamment sur le littoral, la création de nouveaux parcs est limitée entrainant une saturation du marché favorable aux fonds d’investissements.
Dans un contexte financier où l’obligation d’état ne rapporte que 0,7% par an, ces ratios et perspectives font fantasmer les fonds d’investissements, nouveaux pour la plupart, qui se sont rués sur ce marché.
Au revoir l’image d’Epinal du vacancier profitant de l’été au camping, il n’est pas rare désormais d’y croiser des hommes d’affaires en costume trois pièces. Issus de groupes internationaux tels 21 Centrale Partners, Apax parters, 123 IM, Montefiore Investisment, Permira, Carlyle et même un fond de pensions des enseignants de l’Ontario, OTPP, ils sont pris place dans des lieux de vie autrefois réservés aux campeurs classiques.
Des ventes de campings boostées
Face à cet afflux d’investisseurs, de nombreux groupes de gérants indépendants, tels Sunêlia, Flower, Les Castles ou Yelloh ! Village voient leurs propriétaires vendre leurs campings contre une somme importante.
L’un d’entre eux constate « qu’il ne s’agit même plus d’un mercato mais d’un Black Friday à l’envers ! ». Contrairement à cette période de solde où tout est bradé, ici les ventes sont dopées par l’afflux d’investisseurs qui n’hésitent pas à y mettre le prix.
Dans le premier trimestre 2018, l’ex-président de Cartier, Alain-Dominique Perrin, a ainsi revendu pour une belle somme ses deux campings de luxe de Noirmoutier au consortium Franco-chinois Vacances-Center Parcs. Dans la même année au mois de juin, le cofondateur du l’entreprise de restauration Elior, Robert Zolade, a vendu ses huit campings de 3800 places au groupe Vacanselect, anciennement Vacalians propriétaire de 55 campings en son nom et 250 en partenariat, pour une somme proche des 200 millions d’euros selon certaines sources.
Suite à cet achat, le président du directoire du groupe Vacanselect se réjouit de la croissance de sa société ayant atteint à présent un niveau record avec 33000 emplacements sous enseigne dont 30000 gérés en direct. Le développement de Vacanselect permettant d’afficher un chiffre d’affaires de 270 millions d’euros pour 30% de croissance par an a pu être atteint par l’intermédiaire d’une levée de fonds massive et le support de plusieurs fonds d’investissements.
Cet investissement massif a permis à ce groupe de réduire l’écart qui le sépare de son principal concurrent, European Camping Group connu en France sous le nom de Homair, dont le chiffre d’affaires avoisine les 300 millions d’euros. Pour continuer à distancer son rival, le leader du marché a lui-aussi décidé de lever des fonds avec une somme de 90 millions allouée à renforcer son parc comprenant 26 campings et 23000 mobile-homes. Philippe de Trémiolles, directeur général des finances de European camping Group, précise qu’ils auraient pu lever 150 millions d’euros en une semaine montrant l’attrait des investisseurs pour ce marché.
Malheureusement, ces investissements conséquents devraient avoir pour effet d’engendrer une hausse des prix de location des places de campings dans les années à venir. En effet, les fonds d’investissements auront la volonté de rentabiliser leurs placements financiers après toutes ces tractations et regroupements. Cela devrait se ressentir par une amélioration du standing de ces milliers de « groupes d’accueil de plein air » qui se répercutera inévitablement sur le vacancier qui trouvera des équipements neufs…mais également plus chers.